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SUR THOMAS.

dit que c’était un drame moral plein de majesté et d’intérêt, digne d’être représenté devant des sages et des rois.

Mais d’où naît cet intérêt et cette majesté douloureuse qui remplit l’éloge de Marc-Aurèle, et qu’on loue si justement ? C’est que cet éloge a tous les caractères que j’ai indiqués dans l’oraison funèbre. L’orateur a saisi le moment où le corps de Marc-Aurèle est transporté à Rome, au milieu des larmes et de la désolation publique. Et c’est Apollonius qui, penché sur les restes de ce grand homme, déplore sa perte, et raconte ses vertus devant le peuple romain.

Le grand talent qu’on admire dans ce bel ouvrage se soutient souvent à la même hauteur dans quelques chapitres de l’Essai sur les Éloges. Cet Essai n’est au fond que la poétique du genre dont s’était occupé Thomas pendant toute sa vie, et il voulut y renfermer une grande partie de l’histoire universelle ! Le sujet principal est en disproportion avec l’immensité du cadre et la multitude des accessoires. Thomas, en s’efforçant d’enrichir chaque partie de sa composition, manquait souvent l’effet général. Son Essai sur les Éloges a des parties brillantes, mais l’ensemble est défectueux.

L’ancienne police retrancha, dit-on, quelques passages de cet Essai. Du moins on publie dans cette dernière édition un fragment sur Richelieu, qu’on n’avait point vu dans la première. Je ne sais si Thomas n’aurait pas dû des remerciements au censeur qui lui conseilla cette suppression.

Que voit-on, en effet, dans ce fragment ? Tout, excepté le génie de Richelieu. On le condamne sans res-