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ŒUVRES DE FONTANES.

Suis des astres lointains la route mesurée,
Et fixe des vieux temps l’incertaine durée ;
Va, cours avec Platon ou ses disciples vains
Chercher la vérité dans des rêves divins ;
Laisse errer ta raison dans ce dédale immense
Des mystiques erreurs où se perd leur démence,
Et contemple en esprit, Malebranche nouveau,
Le parfait, l’incréé, le vrai bon, le vrai beau ;
Pour t’égaler à Dieu, dépouille la matière.
Tel, dans sa folle extase, un bramine en prière
Croit, en tournant sans cesse, imiter le soleil.
Ose plus : viens t’asseoir au suprême conseil ;
Reprends, corrige, instruis l’éternelle Sagesse ;
Rentre enfin dans toi-même, et ris de ta faiblesse.

 Lorsque les habitants des palais éternels
Voyaient, naguère encor, le plus grand des mortels,
Newton, de la nature expliquer l’harmonie,
D’un fils de la poussière admirant le génie,
Ils se montraient Newton, comme un homme, en passant
À l’homme qui le suit montre un singe amusant.

 Mais Newton qui réglait la comète égarée,
A-t-il mieux lu que nous dans notre âme ignorée ?
Lui, qui de chaque étoile annonçait le retour,
Qui leur disait : Montez, descendez tour à tour,
Connut-il le principe et la fin de son être ?
Hélas ! l’homme apprend tout, et ne peut se connaître ;
Au seul art nécessaire il s’applique sans fruit :
La raison entreprend, la passion détruit.