Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/344

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Encore l’oracle de Delphes n’était-il pas si fort déchu du temps de Plutarque ; car lui-même, dans un autre traité, nous dit que le temple de Delphes était plus magnifique qu’on ne l’avait jamais vu ; qu’on en avait relevé d’anciens bâtiments que le temps commençait à ruiner, et qu’on y en avait ajouté d’autres tout modernes ; que même on voyait une petite ville qui, s’étant formée peu à peu auprès de Delphes, en tirait sa nourriture comme un petit arbre qui pousse au pied d’une grand, et que cette petite ville était parvenue à être plus considérable qu’elle n’avait été depuis mille ans. Mais dans ce dialogue même des oracles qui ont cessé, Démétrius Cilicien, l’un des interlocuteurs, dit qu’avant qu’il commençât ses voyages, les oracles d’Amphilochus et de Mopsus en son pays étaient aussi florissants que jamais ; que véritablement depuis qu’il en était parti, il ne savait pas ce qui leur pouvait être arrivé.

Voilà ce qu’on trouve dans ce traité de Plutarque, auquel je ne sais combien de gens savants vous renvoient, pour vous prouver que les oracles ont cessé à la venue de Jésus-Christ.

Ici mon auteur prétend qu’on est tombé aussi dans une méprise grossière sur un passage du second livre de la Divination. Cicéron se moque d’un oracle qu’on disait qu’Apollon avait rendu en latin à Pyrrhus, qui le consultait sur la guerre qu’il allait faire aux Romains. Cet oracle est équivoque, de sorte qu’on ne sait s’il veut dire que Pyrrhus vaincra les Romains, ou que les Romains vaincront Pyrrhus. L’équivoque est attachée à la construction de la phrase latine, et nous ne la saurions rendre en français. Voici les propres termes de Cicéron sur cet oracle.