Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome III, 1825.djvu/360

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un païen, de qui nous tenons cette histoire ; on peut dire qu’il l’a supposée pour donner à croire que les empereurs considéraient encore les païens. On peut répondre aussi que Zosime, dans l’état où étaient les affaires de sa religion, devait être plutôt d’humeur à se plaindre du mal qu’on ne lui faisait pas qu’à se louer d’une grâce qu’on ne lui aurait pas faite.

Ce qui est constant, c’est que l’on a des inscriptions et de Rome et d’autres villes d’Italie, par lesquelles il paraît que, sous l’empire de Valentinien, des personnes de grande considération firent les sacrifices nommés taurobolia et criobolia, c’est-à-dire aspersion de sang de taureau ou de sang de bélier. Il semble même, par la quantité des inscriptions, que cette cérémonie ait été principalement à la mode du temps de Valentinien et des deux autres empereurs du même nom.

Comme elle est une des plus bizarres et des plus singulières du paganisme, je crois qu’on ne sera pas fâché de la connaître. Prudence, qui pouvait l’avoir vue, nous la décrit assez au long.

On creusait une fosse assez profonde, où celui pour qui se devait faire la cérémonie descendait avec des bandelettes sacrées à la tête, avec une couronne, enfin avec tout un équipage mystérieux. On mettait sur la fosse un couvercle de bois percé de quantité de trous. On amenait sur ce couvercle un taureau couronné de fleurs et ayant les cornes et le front ornés de petites lames d’or. On regorgeait avec un couteau sacré ; son sang coulait par ces trous dans la fosse, et celui qui y était le recevait avec beaucoup de respect ; il y présentait son front, ses joues, ses bras, ses épaules, enfin