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gile a si bien loué Caton, en disant qu’il préside à l’assemblée des plus gens de bien, qui, dans les Champs Élysées, sont séparés d’avec les autres ? C’est que Caton était mort ; et Virgile, qui n’espérait rien ni de lui, ni de sa famille, ne lui a donné qu’un seul vers, et a borné son éloge à une pensée raisonnable. D’ vient qu’il vous a si mal loué en tant de paroles au commencement de ses géorgiques ? Il avait pension de vous.

AUGUSTE.

J’ai donc perdu bien de l’argent en louanges ?

PIERRE ARÉTIN.

J’en suis fâché. Que ne faisiez-vous ce qu’a fait un de vos successeurs, qui, aussitôt qu’il fut parvenu à l’empire, défendit, par un édit exprès, que l’on composât jamais de vers pour lui ?

AUGUSTE.

Hélas ! il avait plus de raison que moi. Les vraies louanges ne sont pas celles qui s’offrent à nous, mais celles que nous arrachons.


DIALOGUE II.

SAPHO, LAURE.


LAURE.

Il est vrai que dans les passions que nous avons eues toutes deux, les muses ont été de la partie, et y ont mis beaucoup d’agrément ; mais il y a cette différence, que c’était vous qui chantiez vos amans, et moi j’étais chantée par le mien.

SAPHO.

Hé bien, cela veut dire que j’aimais autant que vous étiez aimée.