Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome IV, 1825.djvu/238

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déclamations de part et d’autre, on serait tout étonné qu’on n’aurait rien avancé. J’ai cru que le plus court était de consulter un peu sur tout ceci la physique, qui a le secret d’abréger bien des contestations que la rhétorique rend infinies.

Ici, par exemple, après que l’on a reconnu l’égalité naturelle qui est entre les anciens et nous, il ne reste plus aucune difficulté. On voit clairement que toutes les différences, quelles qu’elles soient, doivent être causées par des circonstances étrangères, telles que sont le temps, les gouvernements, l’état des affaires générales.

Les anciens ont tout inventé, c’est sur ce point que leurs partisans triomphent; donc ils avaient beaucoup plus d’esprit que nous: point du tout. Mais ils étaient avant nous. J’aimerais autant qu’on les vantât sur ce qu’ils ont bu les premiers l’eau de nos rivières, et que l’on nous insultât sur ce que nous ne buvons plus que leurs restes. Si l’on nous avait mis en leur place, nous aurions inventé; s’ils étaient en la nôtre, ils ajouteraient à ce qu’ils trouveraient inventé; il n’y a pas là grand mystère.

Je ne parle pas ici des inventions que le hasard fait marâtre, et dont il peut faire honneur, s’il veut, au plus malhabile homme du monde; je ne parle que de celles qui ont demandé quelque méditation et quelque effort d’esprit. Il est certain que les plus grossières de cette espèce n’ont été réservées qu’à des génies extraordinaires, et que tout ce qu’aurait pu faire Archimède dans l’enfance du monde, aurait été d’inventer la charrue. Archimède placé dans un autre siècle, brûle les vaisseaux des Romains avec des miroirs, si cependant ce n’est point là une fable.