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Page:Fontenelle - Œuvres de Fontenelle, Tome IV, 1825.djvu/67

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des lettres ; et avec tout cela, je garantis la durée de mes pièces. J’en sais bien la raison. Qui veut peindre pour l’immortalité doit peindre des sots.


DIALOGUE III.

MARIE STUART, DAVID RICCIO.


DAVID RICCIO.

Non, je ne me consolerai jamais de ma mort.

MARIE STUART.

Il me semble cependant qu’elle fut assez belle pour un musicien. Il fallut que les principaux seigneurs de la cour d’Écosse, et le roi mon mari lui-même conspirassent contre toi ; et l’on n’a jamais pris plus de mesures, ni fait plus de façon pour faire mourir aucun prince.

DAVID RICCIO.

Une mort si magnifique n’était point faite pour un misérable joueur de luth, que la pauvreté avait envoyé d’Italie en Écosse. Il eût mieux valu que vous m’eussiez laissé passer doucement mes jours à votre musique, que de m’élever dans un rang de ministre d’état, qui a sans doute abrégé ma vie.

MARIE STUART.

Je n’eusse jamais cru te trouver si peu sensible aux grâces que je t’ai faites. Était-ce une légère distinction, que de te recevoir tous les jours seul à ma table ? Crois-moi, Riccio, une faveur de cette nature ne faisait point de tort à ta réputation.

DAVID RICCIO.

Elle ne me fit point d’autre tort, sinon qu’il fallut mourir pour l’avoir reçue trop souvent. Hélas ! je dî-