Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/109

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de toute la fortune qu’on doit avoir.

Et qui nous assure, dit la Marquise, que nous demeurerons toujours où nous sommes ? Je commence à craindre que nous ne fassions la folie de nous approcher d’une planète aussi entreprenante que Jupiter, ou qu’il ne vienne vers nous pour nous absorber ; car il me paraît que dans ce grand mouvement, où vous dites qu’est la matière céleste, elle devroit agiter les planètes irrégulièrement, tantôt les approcher, tantôt les éloigner les unes des autres. Nous pourrions aussitôt y gagner qu’y perdre, répondis-je. Peut être irions-nous soumettre à notre domination Mercure ou Mars, qui sont de plus petites planètes, et qui ne nous pourroient résister. Mais nous n’avons rien à espérer ni à craindre, les planètes se tiennent où elles sont, les nouvelles conquêtes leur sont défendues, comme elles l’étoient autrefois aux rois de la Chine. Vous savez bien que, quand on met de l’huile avec de l’eau, l’huile surnage. Qu’on mette sur ces deux liqueurs un corps extrêmement léger, l’huile le soutiendra, et il n’ira pas jusqu’à l’eau. Qu’on y mette un autre corps plus pesant, et qui soit justement d’une certaine pesanteur, il passera au travers de l’huile, qui sera trop faible pour l’arrêter, et tombera jusqu’à ce qu’il rencontre l’eau qui aura la force de le soutenir. Ainsi