Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/92

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pour la distribution du bonheur ou des talens, elle l’aura sans doute pratiqué en grand entre les mondes, et elle se sera bien souvenue de mettre en usage ce secret merveilleux qu’elle a de diversifier toutes choses, et de les égaler en même temps que les compensations.

Êtes-vous contente, Madame ? ajoutai-je. Vous ai-je ouvert un assez grand champ à exercer votre imagination ? Voyez-vous déjà quelques habitants de planètes ? Hélas ! non, répondit-elle. Tout ce que vous me dites là est merveilleusement vain et vague, je ne vois qu’un grand je ne sais quoi où je ne vois rien. Il me faudroit quelque chose de plus déterminé, de plus marqué. Eh bien donc, repris-je, je vais me résoudre à ne vous rien cacher de ce que je sais de plus particulier. C’est une chose que je tiens de très bon lieu, et vous en conviendrez quand je vous aurai cité mes garans. Écoutez, s’il vous plaît, avec un peu de patience. Cela sera assez long.

Il y a dans une planète, que je ne vous nommerai pas encore, des habitants très-vifs, très-laborieux, très-adroits ; ils ne vivent que de pillage, comme quelques-uns de nos Arabes, et c’est là leur unique vice. Du reste, ils sont entre eux d’une intelligence parfaite, travaillant sans cesse de concert et avec zèle au bien de l’état, et sur-tout leur chasteté est incomparable ;