Page:Fontenelle - Entretiens sur la pluralité des mondes, Leroy, 1820.djvu/91

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ailleurs l’expérience y ajoute fort peu de chose ; plus loin les vieillards n’en savent pas plus que les enfants. Ici, on se tourmente de l’avenir plus que du passé, ailleurs on se tourmente du passé plus que de l’avenir ; plus loin on ne se tourmente ni de l’un ni de l’autre, et ceux-là ne sont peut-être pas les plus malheureux. On dit qu’il pourroit bien nous manquer un sixième sens naturel, qui nous apprendroit beaucoup de choses que nous ignorons. Ce sixième sens est apparemment dans quelque autre monde, où il manque quelqu’un des cinq que nous possédons. Peut-être même y a-t-il effectivement un grand nombre de sens naturels ; mais dans le partage que nous avons fait avec les habitants des autres planètes, il ne nous en est échu que cinq, dont nous nous contentons faute d’en connaître d’autres. Nos sciences ont de certaines bornes que l’esprit humain n’a jamais pu passer, il y a un point où elles nous manquent tout à coup ; le reste est pour d’autres mondes où quelque chose de ce que nous savons est inconnu. Cette planète-ci jouit des douceurs de l’amour, mais elle est toujours désolée en plusieurs de ses parties par les fureurs de la guerre. Dans une autre planète on jouit d’une paix éternelle, mais au milieu de cette paix on ne connaît point l’amour, et on s’ennuie. Enfin ce que la nature pratique en petit entre les hommes