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DE LA SICILE.

ici dans une vénération plus grande encore, s’il est possible, que celle de S.te Rosalie à Palerme. Le peuple de Syracuse est d’autant plus superstitieux, que le voisinage de l’Etna lui persuade aisément qu’il est plus près de l’enfer qu’un autre. De cette peur, augmentée par la moindre oscillation de tremblement de terre, naissent des pratiques sans nombre, et un goût pour le merveilleux, riche domaine dont l’exploitation fut dans tous les temps facile et assurée. J’ai vu baiser les mains des moines avec bien plus de componction, lorsque la fumée plus épaisse de l’Etna faisait craindre le réveil de ce volcan : le sentiment religieux devient stupide, lorsqu’il se passionne par la terreur. Ce peuple ne saurait admirer la morale sublime de Jésus-Christ ; on ne la lui prêche pas. La majesté de Dieu lui est cachée par une multitude de saints et de petits bienheureux qui n’ont de crédit qu’à cinq ou six lieues à la ronde. Le Sicilien mêle dans ses respects la hiérarchie céleste, les martyrs, et les souvenirs du paganisme : on rencontre la montagne de Sainte-Vénus on prie dans la chapelle de Saint-Mercure, et j’ai vu le puits de Sainte-Junon.