Page:Forbin - Souvenirs de la Sicile.djvu/184

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
161
DE LA SICILE.

de ces Figaro, et j’aurais imaginé que Beaumarchais avait étudié les mœurs des Siciliens, quoiqu’on rencontre chez eux plus de don Basile que de comte Almaviva. Les moins sauvages entre les seigneurs siciliens vont s’asseoir tous les jours, régulièrement, pendant deux heures, dans la boutique de leur épicier ou de leur marchand de drap, pour y répéter d’éternelles plaintes sur une innovation faite dans l’administration, sur rétablissement du code ou l’imposition de la carta bollata.

Les grandes distractions des dames sont les prises d’habit de quelques pauvres jeunes personnes, bien nobles et bien tristes. Alors on tend l’église du monastère, on prêche, et les parens et amis sont invités pendant quatre jours à manger des dolci[1] au parloir. L’ignorance de ces bonnes religieuses est telle, que j’eus bien de la peine à leur persuader que les Français étaient chrétiens. On eut par politesse l’air de me croire ; mais on était loin d’être convaincu. J’écoutai avec une grande patience l’histoire de l’abbaye depuis sa fondation par le comte

  1. Mélange de sucreries, de gâteaux et de confitures.