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DE LA SICILE.

la Saone formait un lac éclatant de lumière. Tout était fertile et riche dans cette campagne ; tout était riant et prospère autour de moi. Une noce animait la maison où je me trouvais : le vin faisait des heureux de tous les amis du jeune couple. À un demi-mille au-dessous de la terrasse où l’on dansait sous de grands arbres, des religieuses trappistes de la Val-Sainte venaient d’acheter un jardin et une maison délabrée. Travaillant elles-mêmes à la construction d’une église, elles étaient isolées, solitaires, au milieu de la campagne la plus habitée et près d’une ville populeuse. Je suivais, à l’aide d’une lunette, le mélange des travaux si rudes et des prières si vives de ces êtres qui ne tenaient à la vie que par la souffrance. En effet, dans leurs momens de repos, et à peu près tous les quarts d’heure, elles se prosternaient et s’anéantissaient devant Dieu. L’excès de la pénitence nivelait les âges, et imprimait aux traits de ces pieuses filles une parfaite uniformité d’expression ; éteintes par les austérités, le tombeau et la récompense semblaient les attendre toutes le même jour.

Les faibles restes de l’ordre de Malte sont confinés dans un couvent à Catane. Ces suc-