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DE LA SICILE.

Taormine (35), dont le théâtre était placé sur une haute montagne qui s’avance dans la mer. L’art, le goût, la magnificence des anciens s’emparèrent de ce lieu, où ils construisirent un théâtre dont les vestiges composent encore aujourd’hui le plus beau site de l’univers. Assis sur les gradins les plus élevés, on aperçoit, à travers les portiques qui ornaient la scène, l’Etna, l’ancien port de Vénus, le rivage où fut l’autel d’Apollon Archagète, Iaci, Naxos (36), Leontini, Augusta, Syracuse, et une mer immense. Si cette ruine telle qu’elle est émeut et élève l’âme, qu’était-ce donc lorsque, dans le fond du même théâtre, on pouvait voir la lave du volcan menacer le rivage, et ses feux éclairer la scène, tandis que l’esprit et les yeux étaient frappés à-la-fois, ceux-ci par les orages de l’océan, celui-là par les douleurs d’Électre et les infortunes des Atrides ! Ainsi les prodiges de la nature et des arts s’étaient rencontrés sur ce promontoire pour y éblouir tous les yeux, pour y charmer tous les cœurs. Où pouvait-on représenter avec plus de succès le Cyclope d’Euripide, puisque l’Etna, vomissant des tourbillons de fumée, se montrait au fond de la scène ? Dans