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PRÉFACE DE PIERRE LOUYS

puissante voix) à faire connaître et comprendre le remarquable mouvement littéraire d’une école qui aura goûté toutes les émotions, depuis les huées du début jusqu’à la vogue d’aujourd’hui.

M. Paul Fort ne devait pas rester longtemps directeur du théâtre qu’il avait fondé. Après cette preuve d’action, il se donna au rêve, et, dans une solitude féconde, il écrivit ses Ballades, livre admirable.

Le lecteur sera frappé sans doute, dès les premières pages, par la forme stylique de l’ouvrage et il n’est peut-être pas inutile de lui soumettre ici quelques éclaircissements.

Les Ballades Françaises sont de petits poèmes en vers polymorphes ou en alexandrins familiers[1], mais qui se plient à la forme normale de la prose et qui exigent (ceci n’est point négligeable) non pas la diction du vers, mais celle de la prose rythmée. Le seul retour, parfois, de la rime et de l’assonance distingue ce style de la prose lyrique.

Il n’y a pas à s’y tromper, c’est bien un style nouveau. Sans doute M. Péladan (Queste du Graal) et M. Mendès (Lieder) avaient tenté quelque chose d’approchant, l’un avec une richesse de vocabulaire, l’autre avec une virtuosité de syntaxe, qui espacent

  1. Proposons de désigner ainsi les alexandrins qui comprennent douze syllabes sonores et laissent quelques muettes élidées. — (Sur la forme des Ballades Françaises, voir page 273.)