— Je ne puis faire un tel serment.
— Cela suffit… Il y a dans ton passé des choses que tu as intérêt à cacher. Pourtant j’ai plein droit d’avoir une part dans tes adversités, car je te dois la vie… Rappelle-toi que depuis l’année où ensemble nous avons échappé au naufrage du Great-America, où, dans le port de New-York, je t’ai juré un dévouement éternel, je suis pour toi un père : sois pour moi un fils…
Comme il le disait, le capitaine Smith devait la vie à ce marin sombre et taciturne. La connaissance de ces deux hommes datait de deux ans seulement et il y avait déjà tout un roman.
Quatorze mois avant les événements racontés dans ce chapitre, John Smith commandait le Great-America, avant parmi ses simples matelots son second d’aujourd’hui. Un orage épouvantable, imprévu et si commun aux tropiques s’était abattu un jour sur le navire qui avait sombré, perdu corps et biens. Nicholas Houle au milieu du naufrage, saisit le capitaine inanimé, et le coucha sur un quartier de dunette transformé en radeau. Quand Smith revint à lui, sa femme et ses deux seuls enfants étaient au fond de l’abime. Lui et Houle étaient les seuls survivants. Par reconnaissance le capitaine avait instruit son sauveteur dans les affaires de la marine, puis, ayant été nommé peu après au commandement du Marie-Céleste, il en avait fait son second.
Le vieux marin continua :