fait place à la mélancolie ; ses cheveux autrefois flottant sur ses épaules sont maintenant nattés ; une robe noire et longue remplace son costume de fillette.
Au lieu d’une moustache c’est une barbe bien nourrie qui orne à présent la figure halée de Paul Turcotte ; il a laissé son habit d’étoffe du pays et ses bottes tannées pour un habit bleu marin et des souliers français.
Madame Duval a vieilli de quatre ans mais on dirait de beaucoup plus : elle a changé dans le cachot de son mari tant de cheveux noirs contre des fils argentés !
Marie était maintenant grande fille, et bonne à marier, intelligente et gracieuse avec ses dix neuf ans.
Albert avait atteint sa dix septième année. Il vengera son père en s’attachant à la cause qui le fit orphelin.
— Cette journée d’aujourd’hui m’apparaît comme un songe, dit Jeanne en s’asseyant au côté de sa sœur, il me semble qu’il n’y a rien de réel :
— Elle est en effet assez extraordinaire, reprit Paul.
— Tant de choses mises au jour à la fois, fit madame Duval en hochant la tête, comme Dieu est bon d’avoir laissé vivre un homme comme le jeune Gagnon. Et Antoine Martel donc : qui eut soupçonné cela…
— Il s’est déjà fait justice, le pauvre garçon ; on vient de trouver sur le quai ses habits et son chapeau.
— C’est triste pour les parents, eux si respectables.
— Quand aux deux jeunes gens, ils étaient de franches canailles, Charles surtout, il aura une triste fin lui aussi qui est parti avec la malédiction de son père.