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les mystères de montréal

— Et pour quelle raison passerais-tu avant les vieux de la nation.

— Ratraca a donc oublié l’injure sanglante que reçut mon père, quelque temps avant sa mort. Il n’a pas pu la venger, mais en mourant, il m’a fait promettre de donner le premier coup — si possible — au premier Outeiro qui tomberait entre nos mains. Si je ne puis donner ni le premier ni le second, que je donne le troisième.

— La volonté d’un père mourant est quelque chose qu’il faut respecter, répondit le vieux chef. Savanchez, ton père, était un brave. Souvent il rentrait au camp avec quatre chevelures à sa ceinture. Si tu lui as fait une telle promesse, accomplis-la.

— Mais le premier coup est promis.

— Peut-être que Kaposa te céderait sa place.

— Puisque nous avons tous deux des droits à cette place, si nous bandions nos arcs.

De tout temps, chez les sauvages de l’intérieur de l’Amérique du Sud, on a réglé les difficultés en tirant de l’arc. Celui qui vise le mieux a raison.

Le jeune Guaranis était un bon tireur. Il se faisait un jeu de tuer au vol les oiseaux les plus rapides. C’est pourquoi il venait de proposer ce moyen. Kaposa avait l’œil juste lui aussi mais il tirait comme le commun des sauvages.

— Kaposa, fit le vieux chef, voici un frère qui veut te disputer le premier coup de poignard… Tous deux méritez de faire couler la première goutte de sang de