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les mystères de montréal

De retour chez lui, Braun fit mander Jeanne et lui parla ainsi :

— J’ai appris avec peine que vous aviez refusé la main de monsieur de Courval… Pourquoi avez-vous agi de la sorte, Jeanne… Vous savez bien que le banquier est un gentilhomme… Ce refus de votre part me fait d’autant plus de peine, que, sans monsieur de Courval, nous serions dans le chemin à l’heure qu’il est… Vous ignorez, Jeanne, que je suis ruiné… Hier une baisse soudaine, à la Bourse, m’a fait perdre soixante et deux mille piastres… J’ai eu l’idée de m’enfuir : ma maison aurait été vendue si le banquier n’était pas venu à mon secours. Ce matin il m’a ouvert un crédit immense chez lui, me donnant ainsi l’avantage de rentrer dans mes finances, un jour ou l’autre… Et il m’a dit : « Travaillez pour moi auprès de votre belle-sœur »… J’ai cru, Jeanne, qu’en vous confiant ce secret, que pas même votre sœur ne connaît, vous reviendriez sur votre décision… Nous étions perdus sans ressource quand le banquier nous a tendu la main ; tendez-lui la vôtre.

Il s’arrêta, attendant la réponse.

La jeune fille était muette, il lui coûtait de toujours répondre la même chose.

— Vous savez bien, monsieur Braun, dit-elle, après un instant de silence, que je ne suis pas libre d’épouser le banquier. Je suis fiancée à Paul Turcotte et il n’y a rien qui m’assure que ce dernier soit mort.

— Je suppose que Paul Turcotte n’est point mort —