monterons le matin et tu épateras les habituées de l’allée des Poteaux.
— À la bonne heure ! je pardonne… Mais aussi quelle idée de tomber ici sans crier gare !
Votre voiture n’est donc pas arrivée par le haut de la rue ?
— Mais, si ; seulement tu étais absorbée par tes tours de force et tu ne l’as ni vue ni entendue. Voilà ce que c’est que de trop aimer la gymnastique.
— C’est un goût qui date de mon enfance. Mon père m’a donné mes premières leçons quand j’avais à peine sept ans. Vous êtes monté ici tout droit ?
— Mon Dieu, oui ! et j’avoue qu’avant de me montrer je me suis amusé à te regarder par l’interstice des rideaux. J’ai admiré ta force et ta souplesse : j’ai ri des bêtises que te contait ta femme de chambre.
— Comment se fait-il qu’elle ne vous ait pas vu ?
— Elle ne pensait qu’à ses cartes, et quand tu l’as envoyée là-haut, elle a passé tout près de moi sans se douter que j’étais là.
— Il est bon qu’elle le sache, dit la comtesse, en se rapprochant de l’escalier et en élevant la voix.
— Madame m’appelle ? cria la camériste.
— Non. Monsieur vient d’arriver. Dépêche-toi d’apprêter ce qu’il faut pour m’habiller, répondit madame de Lugos.
— Est-ce pour avertir le valet de cœur que tu parles si haut ? demanda en souriant Alfred.
— Mon cher, je ne veux pas de scènes de jalousie. Je n’ai pas d’amant, vous le savez fort bien ; le jour où il me plaira d’en prendre un, je ne me gênerai pas pour vous le dire. Et je vous déclare dès à présent que j’en ai assez de la solitude où vous me confinez. Vos amis doivent pen-