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le pouce crochu

cœur. Du second coup, il abattit, d’une balle dans l’épaule, Georget qui se relevait. Du troisième, il se cassa la tête.

Les sergents de ville trouvèrent deux cadavres et un enfant qui n’était pas tout à fait mort, mais qui n’en valait guère mieux.

Le cocher accourut et s’exclama en reconnaissant, dans le tas, la dame qu’il avait amenée de la rue Mozart.

Il n’arriva pas seul sur le théâtre de cette boucherie. Julien Gémozac, qui n’était pas loin, avait entendu les détonations, et il entra précipitamment dans la cour.

Il venait de voir son père qui lui avait dit où en était mademoiselle Monistrol avec M. de Menestreau et il arrivait dans l’intention bien arrêtée de souffleter cet homme, au risque de se brouiller avec la jeune fille qu’il adorait, malgré tout.

On croira sans peine qu’il ne perdit pas de temps à s’apitoyer sur le sort de son rival et qu’au lieu de se joindre aux gens qui s’occupaient des morts et du blessé, il se précipita dans la maison, où il craignait de ne trouver que le cadavre de Camille.

Au haut de l’escalier, il tomba dans les bras de son ami Fresnay qui descendait sur le champ de bataille et qui lui dit tranquillement :

— Ton amoureuse est là-haut. Va la consoler.

Julien ne s’attarda point à demander de plus amples explications. Il entra dans le salon et il y vit mademoiselle Monistrol affaissée sur un fauteuil, les bras pendants, les yeux hagards, la bouche entrouverte.

— Vous êtes blessée ? lui demanda-t-il en lui prenant les mains.