Page:Fougeret de Monbron - Le Cosmopolite.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mes donner un plat de notre métier à ces mêmes gens-là, nos instruments & nos voix ne furent applaudis que par des éclats de rire aussi scandaleux qu’humiliants. Je me souvins alors d’un de nos Proverbes, qui dit, qu’on ne doit jamais disputer des goûts ni des couleurs. En effet, le goût est arbitraire ; & c’est une sorte de tyrannie de prétendre asservir les autres aux siens. Ce n’est pas une preuve, parce que nous avons adopté la mélodie & la douceur dans notre musique, que les sons aigus & perçants ne puissent avoir leur mérite. Tout dépend en ce monde de la manière dont nous sommes élevés, & de l’habitude. Certaines oreilles peuvent être affectées aussi délicieusement des bruits aigres qui nous rebutent, qu’elles sont choquées de la douceur des sons que nous aimons. Il n’y a point de règle fixe en fait de plaisir & d’agrément. Nous trouvons que c’est un défaut ridicule & insupportable de chanter du nez ; & les