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L’HOMME.

proscrivait ses ouvrages, donec corrigantur. Qui les corrigera ?

V. — Examinez, au Louvre, le portrait de Descartes par Franz Hals ; vous y retrouverez cette grosse tête, « si pleine de raison et d’intelligence », disait Balzac, ce front large et avancé, ces cheveux noirs et rabattus sur des sourcils accentués, ces yeux grands ouverts, ce nez saillant, cette large bouche dont la lèvre inférieure dépasse légèrement celle de dessus, enfin toute cette physionomie sévère et un peu dédaigneuse où il y avait plus de force que de grâce. On lit sur son visage la méditation patiente, obstinée, qui rappelle le bœuf traçant son sillon. L’œil est scrutateur, il semble dire : qu’est cela ? Les lèvres indiquent le jugement et le calme, avec de la bonté. De fait, ses biographes nous apprennent qu’il avait un naturel bon et sensible : il se fit aimer de tous ceux qui le servaient — y compris son valet Guillot, lequel devint, grâce à ses leçons, professeur de mathématiques. On sait qu’en Hollande il connut une personne nommée Hélène, avec laquelle il passa l’hiver de 1634 à 1635 ; au printemps, il s’enferma avec elle dans sa solitude de Deventer. Elle donna le jour à une fille, qui fut baptisée sous le nom de Francine et qui, cinq ans après, mourut entre les bras de son père, le 7 septembre 1640. Descartes n’éprouva jamais, dans sa vie, de plus grande douleur. C’est après la naissance de Francine, et en songeant peut-être à l’avenir de son enfant, que Descartes se résolut enfin à publier