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a travers la vie

de se gâter. Nous ne connaissons plus cette vérité des Classiques qui s’offrait majestueuse et placide, tout d’une pièce, qui s’imposait. Nos œuvres sont dépourvues d’ampleur et de sincérité. Elles sont haletantes comme nous et souvent poussives, toujours comme nous. Il leur manque ce je ne sais quoi de complet et de définitif qui fut comme la signature de nos grands morts. En revanche, elles sont plus minutieuses, plus guindées et d’une humanité plus courante que les leurs. En effet, les Rodrigues, les Alcestes, les Andromaques, les Tartuffes sont des types où toute une classe d’êtres et de sentiments humains a été condensée, ils sont plus grands que nature ; les personnages dessinés par les écrivains d’aujourd’hui ont des proportions moins gigantesques et sont crayonnés d’une main moins virile, moins autoritaire. Disons-le à la gloire des modernes, ils ont compris la dualité de notre être, tandis que les Classiques, sauf en de très rares exceptions, ont toujours négligé complètement l’homme physique pour l’homme spirituel.

A quelque école philosophique qu’on appartienne, il faut reconnaître qu’en ce monde notre individu est un composé, un ensemble, ou au moins que les phénomènes qui se passent en lui