Page:Fourier - Sur l'esprit irréligieux des modernes et dernières analogies 1850.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

en Amérique et dans tous les pays civilisés, la nécessité où sont les princes, même les plus doux, de s’étayer par les rigueurs et la crainte, l’inhabileté de quelques-uns, qui, ayant tant de moyens de se faire aimer, n’ont su organiser leurs états qu’à la manière jacobite, et ressusciter en chaque canton des comités de dénonciateurs secrets, quand on voit l’impatience secrète des sujets, la haine contre l’autorité et la tendance de la Civilisation à une explosion générale qui n’attend qu’un [xxxxxxxxxxxx], on doit conclure que jamais il ne fut plus urgent de bien [xxxxxxxx] ; mais pour traiter une maladie, il faut d’abord en assigner exactement les causes, et par conséquent signaler les véritables auteurs de l’irréligion, l’un des plus grands fléaux de la génération moderne, celui qui ouvre la voie à des révolutions pires peut-être que celles d’où nous sortons à peine.

L’irréligion est un fléau si désastreux qu’il importe d’en signaler les causes, les auteurs et les effets. Il règne de grandes erreurs à cet égard. Pour ne parler que des auteurs, on attribue exclusivement le désordre aux philosophes.

Sans doute ils y ont contribué, mais secondairement. Le sacerdoce est le principal coupable. Je vais distinguer les torts respectifs et rendre à chacun selon ses mérites.

Pour ne pas imiter ces artisans de supplices qui dévouent aux mêmes tortures l’intéressante vestale et le sanguinaire Néron, établissons la gradation des délits et posons en principe que les superstitieux qui ont préparé l’irréligion, sont encore plus coupables que les philosophes qui l’ont inventée. Lequel est le plus coupable, ou du larron qui spolie une maison, ou du serviteur qui, préposé à la garde, livre les clefs au larron et favorise la spoliation, tout en opposant une feinte résistance ? Tel a été dans l’irréligion le rôle des superstitieux ; ils ont sacrifié la religion à l’appât des extorsions et donations dont ils fondaient l’espoir sur les terreurs infernales.

Le sacerdoce pouvait-il ignorer que les philosophes, agitateurs de profession, sophistes par métier autant que par faux jugement, et toujours aux aguets des moyens de brouiller et révolutionner le mécanisme dans une branche quelconque, ne manqueraient pas d’attaquer le système religieux sur les points affaiblis, et que c’était compromettre à la fois l’honneur de la Divinité et le repos de la société, que de produire des dogmes qui exposent Dieu au ridicule, au dédain et à la haine, dogmes faits pour soulever les enfants mêmes ; car qui de nous n’a pas été révolté dès son enfance d’entendre dire qu’il n’est point de salut hors l’église romaine, et que six cent millions de barbares et sauvages seront à chaque génération plongés dans les flammes pour n’avoir pas ouï parler de l’église romaine ?