Aller au contenu

Page:Fournel - Les Hommes du 14 juillet, 1890.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
11
LA BASTILLE EN 1789.

renseignement est isolé ; cependant il est difficile de le révoquer en doute : on ne comprendrait pas comment un « Guide dans Paris », fait avec soin, se serait trompé sur un point pareil. Seulement on peut croire que la visite était restreinte aux parties plus ou moins extérieures et que l’usage ne dura pas bien longtemps.

On ne me prêtera pas, je l’espère, l’idée d’avoir voulu, en combattant les erreurs et les hyperboles, démontrer que la Bastille était un lieu de plaisance, pas plus qu’un temple gastronomique. J’ai voulu simplement montrer que cet endroit — où Voltaire acheva son Œdipe et écrivit les deux premiers chants de la Henriade ; où Lemaistre de Sacy traduisit l’Ancien Testament, et Fontaine composa la Bible de Boyaumont ; où le caustique abbé Lenglet-Dufresnoy retourna gaillardement cinq ou six fois de suite, tellement qu’il avait fini par s’y habituer et que, dès qu’il voyait paraître l’exempt Tapin, il criait à sa gouvernante : « Allons, vite mon petit paquet ! du linge ! du tabac ! » — n’était vraiment pas si noir qu’on l’a fait souvent. Bien entendu il ne s’agit pas des cachots, qui étaient fort vilains, mais des chambres, séjour ordinaire des prisonniers. On peut dire que, dans la plupart des cas, non seulement les grands seigneurs, mais les hommes de lettres[1],

  1. On l’appelait, en forme de plaisanterie, l’hôtel des gens de lettres.