Page:Fournier - Le Théâtre français au XVIe et au XVIIe siècle, t. 1, Garnier.djvu/28

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De penser, Alix est à moi,

Et me tient seul ami certain :

Alix dis-je plus grand putain

Qu'on puisse voir en aucun lieu, [385]

Et qui veut sans crainte de Dieu

Se bâtir aux cieux une porte,

Par l'amour qu'à tous elle porte

Exerçant sans fin charité.

Assez longtemps elle a été [390]

À un Florimond, homme d'armes,

Qui par avant sous les alarmes,

Pae qui son amour l'asservit,

Longtemps à Hélène servit,

Soeur de ce bel Abbé mon maître, [395]

Sans par son pourchas jamais être

Reçu au dernier point de grâce.

Tant qu'étant vaincu de l'audace

De sa maîtresse impitoyable ;

Pour passer l'amour indomptable, [400]

Et amortir sa fantaisie,

Fût par lui cette Alix choisie,

Laquelle il entretint toujours,

Non pas seul maître des amours,

Jusques à ce camp d'Allemagne, [405]

Pour lequel se mît en campagne :

Mêmes on m'a dit qu'un grand zèle

Florimond avait envers elle.

Mais qui veut bien aimer, ne fasse

Aux Parisiennes la chasse : [410]

Et puis notre Abbé, notre brave

Fol masqué d'un visage grave,

Ce sot, ce messer coyon pense

Avoir eu seul la jouissance,

Et l'a mise en son mariage [415]

Afin qu'il fît un cocuage

De mari et d'ami ensemble.

Mais, je vous prie, que vous semble

Des morgues, que je tiens vers lui ?

S'il dit oui, je dis oui : [420]

S'il dit non, je dis aussi non :

S'il veut exalter son renom,

Je le pousserai par ma voix

Plus haut que tous les cieux trois fois.