Page:Fournier - Le Théâtre français au XVIe et au XVIIe siècle, t. 1, Garnier.djvu/27

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Afin de me la garder mieux !

Qu'on épie, que l'on regarde, [345]

Qu'on s'enquière, qu'on prenne garde

De n'être en embûche trouvé,

Après avoir bien éprouvé.

Pour le loyer de ton office

Je te voue un bon bénéfice. [350]

Messire Jean


Grand merci Monsieur, c'est de grâce :

Ne vous souciez que je fasse,

N'ayez de ces deux points émoi,

Dès ores je prends tout sur moi.



Scène II



Messire Jean


Ainsi, Dieu m'aime, on voit ici [355]

Maints aveuglés, qui sont ainsi

Que les flots enflés de la mer,

Qu'on voit lever, puis s'abîmer

Jusques au plus profond de l'eau.

Ceux-ci se fichant au cerveau [360]

Un contentement qu'ils se donnent,

Dessus lequel ils se façonnent

Le portrait d'une heureuse vie,

Voyent soudain suivre l'envie

Du sort bien souvent irrité, [365]

Rabaissant leur félicité.

Songez à celui qu'avez vu,

Ce brave Abbé tant bien pourvu

Moins en l'Église qu'en folie :

Songez dis-je, au mal qui le lie, [370]

Ains l'étrangle tant doucement

D'un folâtre contentement :

Il se fait seul heureux, en tout

Il n'imagine point de bout,

Il ne prévoit, et ne prévient [375]

Au malheur, qui souvent advient :

Et qui pis est, voir il n'a su

Qu'il est journellement déçu.

L'aveuglement est le moyen

De tourner un beaucoup en rien. [380]

Il est si fol, comme je vois,