Afin de me la garder mieux !
Qu'on épie, que l'on regarde, [345]
Qu'on s'enquière, qu'on prenne garde
De n'être en embûche trouvé,
Après avoir bien éprouvé.
Pour le loyer de ton office
Je te voue un bon bénéfice. [350]
Grand merci Monsieur, c'est de grâce :
Ne vous souciez que je fasse,
N'ayez de ces deux points émoi,
Dès ores je prends tout sur moi.
Scène II
Ainsi, Dieu m'aime, on voit ici [355]
Maints aveuglés, qui sont ainsi
Que les flots enflés de la mer,
Qu'on voit lever, puis s'abîmer
Jusques au plus profond de l'eau.
Ceux-ci se fichant au cerveau [360]
Un contentement qu'ils se donnent,
Dessus lequel ils se façonnent
Le portrait d'une heureuse vie,
Voyent soudain suivre l'envie
Du sort bien souvent irrité, [365]
Rabaissant leur félicité.
Songez à celui qu'avez vu,
Ce brave Abbé tant bien pourvu
Moins en l'Église qu'en folie :
Songez dis-je, au mal qui le lie, [370]
Ains l'étrangle tant doucement
D'un folâtre contentement :
Il se fait seul heureux, en tout
Il n'imagine point de bout,
Il ne prévoit, et ne prévient [375]
Au malheur, qui souvent advient :
Et qui pis est, voir il n'a su
Qu'il est journellement déçu.
L'aveuglement est le moyen
De tourner un beaucoup en rien. [380]
Il est si fol, comme je vois,