Anime les ressorts d'une âme frénétique,
Et par des visions produit mille plaisirs
Qui charment la vigueur des plus nobles désirs ; [140]
Apprends à révérer par un fatal augure
De ma pudicité l'adorable figure.
Ô merveilleux discours, ô mots sentencieux ;
Capables d'arrêter les plus audacieux.
Dieux ! Qu'en toutes façons cette belle est charmante ; [145]
Et que je sens pour elle une ardeur véhémente.
Ami, que te dit-elle encore outre cela ?
Elle me dit Adieu, puis elle s'en alla.
J'adore en mon esprit cette beauté divine.
Qui sans doute du ciel tire son origine. [150]
Je me meurs, Amidor, du désir de la voir.
Quand aurai-je cet heur ?
Peut-être sur le soir :
Quand la brunette nuit développant ses voiles,
Conduira par le ciel le grand bal des étoiles.
Ô merveilleux effet de ses rares beautés ! [155]
Incomparable amas de nobles qualités !
Déjà de liberté mon âme est dépourvue :
Le récit m'a blessé, je mourrai de sa vue.
Prépare-toi mon coeur à mille maux divers.
Adieu, sur ce sujet je vais faire des vers. [160]
Que tu m'obligeras, Amidor, je t'en prie,
Tandis pour soulager l'excès de ma furie,
Je m'en vais soupirer l'ardeur de mon amour,
Et toucher de pitié tous ces lieux d'alentour.