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Page:Fournier - Le Théâtre français au XVIe et au XVIIe siècle, t. 2, Garnier.djvu/394

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D'un autre plus cruel j'en fis mourir un cent.

Je sens, quand on me parle, une haleine de flamme.

Ceux qui n'osent parler m'adorent en leur âme. [450]

Mille viennent par jour se soumettre à ma loi,

Je sens toujours des coeurs voler autour de moi

Sans cesse des soupirs, sifflent à mes oreilles.

Mille voeux élancés m'entourent comme abeilles.

Les pleurs près de mes pieds courent comme torrents, [455]

Toujours je pense ouïr la plainte des mourants ;

Un regret, un sanglot, une voix languissante,

Un cri désespéré d'une douleur pressante,

Un je brûle d'amour, un hélas je me meurs :

La nuit je n'en dors point, je n'entends que clameurs [460]

Qui d'un trait de piété, s'efforcent de m'atteindre :

Voyez, ma chère soeur, suis-je pas bien à plaindre ?

MÉLISSE
.


Il faut vous détromper : il n'en est pas ainsi.

Ce nouvel amoureux qui me parlait ici,

Qui se promet de rendre une fille opulente. [465]

HESPÉRIE
.


Quoi ? Voulez-vous encor me parler de Phalante ?

Que vous êtes cruelle.

MÉLISSE
.


Écoutez un moment

Je veux vous annoncer que ce nouvel amant.

HESPÉRIE
.


Ah ! Bons Dieux que d'amants ! Qu'un peu je me repose :

N'entendrai-je jamais discourir d'autre chose ? [470]

MÉLISSE
.


Mais laissez-moi donc dire.

HESPÉRIE
.


Ah ! Dieux quelle pitié !

Si vous avez pour moi tant soit peu d'amitié :

Ne parlons plus d'amour, souffrez que je respire.

MÉLISSE
.


Vous ignorez, ma soeur, ce que je veux vous dire.

HESPÉRIE
.


Je sais tous les discours de tous ces amoureux. [475]

Qu'il brûle, qu'il se meurt, qu'il est tout langoureux,

Que jamais d'un seul coup âme ne fut atteinte,

Que pour avoir secours il vous refait sa plainte,