Page:Fournier - Le Théâtre français au XVIe et au XVIIe siècle, t. 2, Garnier.djvu/428

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FILIDAN
.


C'est celle que j'ai vue en ce même moment.

HESPÉRIE
.


C'est doncques pour ma soeur que votre coeur soupire ? [1375]

FILIDAN
.


Non.

HESPÉRIE
.


Ma soeur, pouvait-il plus adroitement dire

Que c'est moi qu'il chérit, car c'est l'une des deux.

Respectueux amant, on accepte vos voeux ?

Celle que vous aimez, de ma part vous assure

Qu'elle a pitié des maux que votre coeur endure, [1380]

Mais sans rien désirer adorez sa vertu.

FILIDAN
.


Ô doux soulagement d'un esprit abattu !

Que je baise vos mains pour l'heureuse nouvelle

Que ma Déesse envoie à son Amant fidèle.

HESPÉRIE
.


Mais vous de qui l'esprit par tant de nobles vers [1385]

Du bruit de cette Nymphe a rempli l'Univers,

Quittez vos déplaisirs, car pour reconnaissance

Sachez qu'elle vous donne une ample récompense.

FILIDAN
.


Il est vrai que c'est lui qui causa mon ardeur.

AMIDOR
.


Quel don puis-je espérer digne de sa grandeur ? [1390]

HESPÉRIE
.


Vous allez devenir le plus riche du monde.

AMIDOR
.


Hélas ! Sur quoi veut-on que cet espoir se fonde ?

HESPÉRIE
.


Elle peut pour le moins compter cent mille amants

Qui vivant sous ses lois souffrent mille tourments.

Elle va publier, pour soulager leur peine [1395]

Qu'ils n'ont qu'à lui donner des vers de votre veine :

Vous verrez arriver de cent climats divers

Ces pauvres languissants pour avoir de vos vers,

Vous offrir des présents, des innombrables sommes :

Vous voilà dans un mois le plus riche des hommes. [1400]

AMIDOR
.


Ô Dieux ! Les voyageurs sur les Indiques bords

N'amassèrent jamais de si riches trésors.

Quels beaux champs triomphaux, et quels Panégyriques

Mériteront de moi ses bontés héroïques ?