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UN MURILLO

— Sainte Vierge, s’écria-t-il ; dans trois jours d’ici c’est la Noël ; si je vends ce tableau, je fais vœu d’en peindre d’ici là une copie pour la crèche de mon village !

Et plein de confiance — sa dépêche partie pour New-York — le jeune peintre s’était mis à l’œuvre.

Cette copie en deux jours, c’était une rude tâche, mais il y arriverait.

Deux jours de plus sans voir sa mère, après six ans d’absence, c’était une grande épreuve, mais il s’y soumettrait.

Nous savons déjà que le Murillo avait victorieusement subi l’épreuve de l’expert, et que Maurice Flavigny n’attendait plus que d’avoir donné le dernier coup de pinceau à sa copie, pour toucher le prix de l’original.

Qu’on nous permette d’abréger.

Vers trois heures de l’après-midi, après avoir soldé sa note d’hôtel, conclu ses derniers arrangements avec l’agent de la maison Boussod et Valadon, et fait emballer sa précieuse copie ornée d’un joli cadre en or fin commandé d’avance, le jeune voyageur avait traversé le fleuve à Longueuil, et là avait pris une voiture de louage pour se faire conduire à Contrecœur.

On le retrouve frappant à la porte du presbytère de cette dernière paroisse, son ex-voto à la main.

Le curé, enchanté de l’aubaine, naturellement, accueillit avec une extrême courtoisie le jeune voyageur, qu’il connaissait seulement de nom, n’étant que depuis trois ans à la tête de la paroisse.