Page:Fréchette - Félix Poutré - 1871.djvu/16

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ici, et conséquemment elles arriveront demain sur les dix ou onze heures du soir. Ils sont à peu près cinq mille hommes. Pars immédiatement et rends-toi à Lacolle où les armes doivent être arrivées maintenant. Il doit y avoir cinq mille fusils et des munitions. » Je me donnai bien de garde d'attendre le jour. Je partis aussitôt pour Lacolle, déterminé à remplir ma mission avec honneur. Chemin faisant, je m'arrêtai à chaque maison où j'espérais trouver un cheval et une voiture, et j'ordonnai plutôt que je ne demandai aux gens de me suivre pour aller chercher ces armes si longtemps attendues. Arrivé à Lacolle, je m'informai... Rien !... La réalité me frappa comme un coup de foudre... Rien !... Nous étions trahis et Côté avait voulu m'éloigner pour s'évader plus facilement ; c'était toujours deux yeux de moins.

Béchard Oh ! le scélérat.

Poutré Et maintenant que vas-tu faire, Félix ? Les troupes anglaises sont à quelques milles du village...

Félix Que voulez-vous que nous fassions contre cinq mille hommes de troupes régulières avec quatre cents mauvais fusils ? Ah ! si nous en avions une fois des fusils ! de vrais fusils de soldat !... Mais à quoi cela sert ? Tout est fini, c'est bien clair !... Séparons-nous, mes pauvres amis, et que chacun prenne son côté ! Malheur à qui sera pris !...

Béchard Tu as raison, Félix ; tout est fini pour cette fois. L'heure de la délivrance n'est pas encore sonnée. Séparons-nous. Adieu ! adieu, mes braves amis.

(Les patriotes serrent la main de Félix et sortent.)

Félix Adieu, braves compagnons ! Puisse la trahison ne pas avoir de suites plus funestes !...

Toinon (à part) Et puis dire que j'ai pas pu tant seulement en déplanter la moquié d'un !...



Scène VI

Poutré, Félix, Toinon

Félix Allons, c'est donc fini... Oh ! les traîtres !... (Il contemple son fusil et l'embrasse.) Adieu, mon fidèle mousquet, voilà la deuxième fois que tu combats pour la patrie, puisses-tu, dans des jours meilleurs, être encore le défenseur de la bonne cause ! (Il suspend son fusil au mur et s'assied tristement.)

Toinon Mon capitaine... sans vous interboliser... (Silence.) Sus vot' respect, mon capitaine.

Félix Que me veux-tu ?

Toinon C'est que, mon capitaine...

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