Page:Fréchette - Poésies choisies, I, 1908.djvu/194

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Ne prêtez pas la main à ce honteux marché ;
Je puis, huit jours au moins, dans mon camp retranché,
Avec mes bataillons tenir tête à l’orage ;
Et si la France encor, trompant notre courage,
Refuse d’ici là le secours imploré,
Dans un combat fatal, sanglant, désespéré,
Tragique dénoûment d’une antique querelle,
Nous saurons lui montrer comment on meurt pour elle ! ―

Vaudreuil signa pourtant. Refuser d’obéir,
C’était plus que braver la mort, c’était trahir.

― Trahir ! avait pensé le guerrier sans reproche...

Et c’est lui qui, dans l’ombre, avant que l’aube approche,
À ses soldats émus dans la nuit se mouvant,
Avait jeté ce cri : ― Les drapeaux en avant !
Allait-il les livrer ? Allait-il, à la face
De tous ces vétérans ― honte que rien n’efface ―
Souiller son écusson d’un opprobre éternel ?
On attendait navré le moment solennel.