Page:Frémine - Statue de Napoléon Ier à Cherbourg, 1859.djvu/7

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Mais, pourquoi contempler des tableaux qui s’effacent ?
Les douleurs ici-bas comme les plaisirs passent,
Après les vents d’hiver les brises de printemps :
Du concert qui te fête écoulons les accents.

Ainsi, quand l’étranger sur les Alpes sublimes
Avance lentement vers les neigeuses cimes.
Si petit près des monts que ses pas vont franchir,
Plus d’une fois, sans doute, il se sent défaillir.
Il entend le torrent qui rugit et qui fume
De rochers en rochers promener son écume.
Il marche ; le sentier sous ses pieds glisse et fuit,
L’abîme est au-dessus, l’abîme autour de lui ;
Les aigles de montagne, au milieu des nuages,
Aux bises du désert jettent leurs cris sauvages ;
Et, lorsqu’il va gravir la dernière hauteur,
Sa tête tourbillonne, il frémit, et son cœur,
Que déjà la mort vient endormir sous ses ailes,
Ne bat plus au frisson des neiges éternelles.
Mais il résiste, il lutte, il arrive ; et, soudain,
Il sent un air plus doux courir au ciel serein ;
Dans sa béatitude il s’arrête et s’oublie ;
C’est qu’à ses pieds, couchée, est la chaude Italie,
Nonchalente et rêvant au bruit de ses trois mers.
Au parfum des jasmins et des orangers verts,
Avec ses souvenirs, avec ses filles brunes,
Venise sommeillant au fond de ses lagunes,
Naples près des flots bleus, Rome aux grands horizons,
Les fêtes, la folie, éternelles chansons.

Mais que te fait la foule ou contente ou colère,
À quoi bon courtiser la hideuse chimère
Qui, tour-à-tour, maudit et caresse ses rois ?
Son amour, c’est le feu qui flambe au bord d’un bois.
Foyer errant, la nuit allumé par un pâtre
Et qu’au matin le vent bat d’une aile folâtre.
Jetant cendre et bruyère aux sentiers du coteau.
Regarde, les yeux secs, ce mobile tableau,
Car, semblable aux vertus, fruits de la conscience.
L’artiste trouve en lui sa seule récompense ;