Page:Fraigneau - Rouen Bizarre.djvu/147

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L’asile possède depuis assez longtemps un sujet bien curieux : c’est un « incohérent » dans toute la force du terme. Les cas, aussi bien spécifiés que celui-là, sont rares.

L’homme que nous avons vu causerait pendant des journées entières, passant d’une idée a une autre, enchevêtrant les mots selon les consonnances qui le frappent, faisant en quantité des espèces de calembours dans le genre de celui qu’il nous décocha en partant, sur un ton de suprême mépris : « Je suis le soleil, vous n’êtes que le solard. »

Ces êtres-là sont inoffensifs ; quelques accès de fureur les prennent cependant parfois, mais à des intervalles très-peu fréquens, aussi la surveillance s’exerce-t-elle facilement. On ne peut en dire autant du quartier des agités ou les gardiens sont presque aussi nombreux que les malades. Qu’on se représente des têtes grimaçantes, des corps s’agitant sous les secousses du delirium tremens, des yeux furibonds, des poings qui menacent, des dents qui grincent. Les employés de l’asile, les internes, le directeur, que les aliénés finissent cependant par reconnaitre à force de les voir, sont parfois