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Page:Fraigneau - Rouen Bizarre.djvu/161

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telle et qu’elle ne sert à rien, qu’elle n’a aucune raison d’être en ce monde, qu’elle voudrait ne pas exister et que c’est impossible. Son cœur est de bois, ses yeux sont de bois, sa personne est complètement invulnérable. Et elle pleure, elle se désole en songeant à son éternité. Il est difficile, lorsqu’elle est en proie à une crise plus forte que d’habitude, de la faire manger et de la coucher. « Je n’ai pas besoin de nourriture, murmure-t-elle, puisque je vis quand même. » Elle n’essaye pas de se tuer ; à quoi bon ? Souffrance terrible qui l’obsède jour et nuit.

Nouvelle salle, nouveaux types. Là, le bruit augmente, l’agitation grandit. Monologues perpétuels, chansons monotones, cheveux en désordre, gestes brusques, promenades de long en large avec des arrêts subits, de temps en temps un nom d’homme qui éclate comme une plainte, un petit vêtement d’enfant qu’on tire de sa poche et qu’on regarde en pleurant, une croix, une bague, une pièce de monnaie qu’on serre nerveusement dans des mains qui se crispent. Derniers souvenirs de quelque grande joie, de quelque grand malheur, de quelque drame inconnu qui a jeté dans l’asile une folle de plus.

Enfin, nous pénétrons dans la salle des agi-