Page:François Hüe - Souvenirs du Baron Hüe publiés par le baron de Maricourt, 1903.djvu/167

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sur l’échafaud, m’offrit de me conduire jusqu’à mon logement ; j’acceptai sa preposition. Chemin faisant, il osa me montrer plusieurs portraits en miniature, qu’il s’était appropriés le jour des massacres. « Les figures vous sont-elles connues ? » me demanda-t-il. Une d’elles me l’était particulièrement. « Eh bien ! me dit le municipal, aucune de ces personnes n’existe présentement. » Je frémis d’horreur et quittai brusquement ce conducteur féroce.

Malgré tous les périls réunis sur ma tête, la liberté n’eut pas pour moi le même charme que pour les autres victimes échappées à la mort. L’idée toujours présente de la captivité du Roi et de la famille royale ne me laissait aucun instant de repos. Porter mes pas à la tour du Temple était le seul adoucissement a mes peines. Je contemplais ce misérable réduit où le premier Roi du monde, ce Roi si digne d’être aimé, était emprisonné par des sujets rebelles. Mon imagination en parcourait l’enceinte avec un douloureux intérêt. Mais, disais-je avec l’accent du désespoir, si mes yeux ne doivent plus revoir les objets sacrés de mon dévouement, mon cœur ne cessera de leur être fidèle. J’attesterai partout, je publierai les conjurations et les trames de leurs ennemis,