Page:François d’Aure-Geneviève ou L'innocence reconnue tragédie, 1670.djvu/114

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À Sifroy

Faites-lui des leçons (mon cour) parlez en maître,

Que me reconnaissant il sache se connaître. 2315 Il est si peu savant, que même à son insu

Il nous a fait du bien sans en avoir reçu.

SIFROY

Çà, mon bon Serviteur ; viens-çà que je t'embrasse ;

C'est par toi que j'ai fait ma ravissante chasse.

Ne meurs pas ignorant, apprends auparavant 2320 Que mon épouse vit, que mon Fils est vivant,

Et que leur vie de la mienne est suivie,

D'autant que par leur mort j'eusse perdu ma vie.

De te faire mourir, serais-je bien humain,

Après m'avoir reçu trois vies de ta main. 2325 Pour te récompenser je suis dans l'impuissance,

J'y ferai mes efforts, et suffit que j'y pense.

Ma chère épouse et moi te donnons cependant,

Tous les biens et l'état du perfide Intendant.

Pour tes fidélités, tes vertus, tes mérites, 2330 Ces satisfactions ne sont que trop petites.

HENRY

Je ne sais si je rêve, au prix de ce bienfait

Je me connais bien moins que je n'ai jamais fait.

Tous ses biens, Monseigneur ?

SIFROY

Oui, et le plus insigne

De ses biens, et duquel il fut le plus indigne, 2335 Que tu ne comprends pas (qu'on ne peut mériter)

Est celui dont le Ciel te veut faire héritier.

Connais-tu cette Dame ? Est-elle assez charmante

Lui montrant Gertrude

Pour te faire vouloir qu'elle soit ton Amante ?

Comme aussi l'obliger d'un pareil traitement, 2340 Que d'un tel Serviteur elle fasse un Amant.

Ne crains point, j'ai rendu ses beautés délivrées

De l'indigne sujet de ses tristes livrées.