1840 Et jugeant à mes pleurs qu'elle parlait en vain ;
Vous m'aimez, me dit-elle ; et serait-il possible
Que ne m'aimassiez que d'un amour sensible ?
Si vous savez qu'aimer n'est que vouloir du bien,
Aimez-moi d'un égard raisonnable et chrétien. 1845 Quel bien me voudriez-vous, en voulant la durée
De la peine que j'ai si longtemps endurée ?
Elle court à sa fin que je dois supposer,
Pourquoi la voudriez-vous plus longtemps arrêter
Dieu m'en veut affranchir, en voulant que je meure.
1850 Vous pleurez.
.
À ces mots, je pleurai et j'en pleure.
J'avoue qu'il faudrait à ces mots de pitié,
Pour être sans regret, être sans amitié.
.
Enfin à ma retraite, et sur l'heure dernière
De recevoir l'Adieu de notre prisonnière : 1855 Germaine (me dit-elle) auriez-vous le loisir,
Sans vous incommoder, de me faire un plaisir ?
À quoi je répondis, toute mon envie,
Eût été de mourir pour lui sauver la vie.
Vivez (répartit-elle) en ayant la bonté 1860 De me faire un plaisir sans incommodité.
Voyez mon Cabinet, et vite sans mot dire
Portez-moi du papier et d'encre pour écrire.
Tous mes joyaux y sont, visitez et prenez ;
Mais avec diligence allez et revenez. 1865 J'y courus aussitôt, et sans être aperçue,
Ni toucher aux joyaux, me remis à sa vue
Et dès lors promptement à mes yeux, à mon su
Elle fit cet Écrit que vous avez reçu.
Et recourant encor, sans aucune aventure 1870 Je mis au Cabinet et l'encre et l'écriture,