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GUIDE DU BON SENS

les occasions qui nous ont jamais manqué de nous ennuyer.

Mais qu’il y ait d’autres raisons à l’ennui, cela n’empêche pas que l’uniformité n’en soit une, et peut-être la plus évidente.

Celui-là n’était-il pas un sage qui, dès avant 1914, envisageant l’éventualité d’une guerre, annonçait que l’ennui serait alors l’adversaire le plus redoutable et le plus farouche contre lequel auraient à se défendre les combattants ; il avait prévu la guerre de stabilisation, la guerre des tranchées ; et il n’est pas douteux que, de 1914 à 1918, dans les tranchées, on a beaucoup souffert, certes, — et comment !… — mais on s’est aussi beaucoup ennuyé.

La persistance des beaux jours, un soleil qui ne cesse pas d’être radieux, ne finissent-ils pas par nous faire souhaiter un orage ? À plus forte raison, quand des jours de pluie succèdent sans arrêt à des jours de pluie, n’as-tu pas envie de rester au lit, le visage tourné contre le mur, en attendant des jours meilleurs, c’est-à-dire un changement de temps !…

Tout et n’importe quoi, pourvu que ça change ! C’est pour rompre la monotonie de son bonheur, bien plutôt que pour conjurer un malheur imminent, que Polycrate jette son anneau à la mer.

J’ai connu un homme, dans une calme et d’ailleurs ravissante petite sous-préfecture,