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GUIDE DU BON SENS

exemple, qui n’a rien d’un chef de tribu, et n’est qu’un simple chef de bureau de ministère, pour sa femme et pour ses enfants, n’est-il pas constant que leur pudeur aussi se déplace, non d’après la latitude, mais de façon saisonnière : ne suffit-il pas que soient venus les mois de vacances et l’annuel séjour au bord de la mer, pour que lui, sa femme et ses enfants, témoignent d’une complète impudicité au regard de ce qu’est cette femme quand elle fait des visites ou se précipite aux soldes des grands magasins, cet homme quand il va à son bureau, ces jeunes garçons et ces jeunes filles quand ils se rendent à leur cours ou à la matinée classique du Théâtre-Français ?

Ce déplacement de leur pudeur correspond-il à une perte momentanée, mais totale et régulière, de tout leur bon sens ?

Il y a un mot, dont on usa d’abord avec discrétion, dans l’acception distinguée que lui prêtaient les seuls lettrés et qui, peu à peu, a été mis à toutes les sauces, même à la sauce politique, et finira par tomber dans le jargon parlementaire, c’est le mot « climat ». Entendez par là cette atmosphère indispensable au développement d’un sentiment exceptionnel et choisi : on s’aperçoit qu’il existe un « climat » pour la pudeur, tandis qu’il n’en existe pas et n’en saurait exister pour le bon sens.

Parce qu’il n’y a pas, pour le bon sens, de