Page:Franc-Nohain - Guide du bon sens (1932).djvu/97

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

96

GUIDE DU BON SENS

moulin à vent, et qui ait des ailes, les ailes s’arrêteront avec le vent.

POLYDOXE. — Si le vent soufflait tout le temps, savez-vous que ce serait bien fatigant, sinon pour lui, pour nous que sa paresse repose, et le calme qui en résultera ?

EUDOXE. — On aurait tort de confondre le repos et la paresse ; leurs fins sont sensiblement différentes, et même diamétralement opposées : l’homme paresseux se repose pour se reposer ; la cessation du travail a ici pour objet cette cessation même ; au lieu que tout autre que le paresseux envisage la cessation du travail, et le repos qui l’accompagne, comme un moyen de récupérer des forces pour mieux travailler à nouveau. La différence est de qui veut s’anéantir dans la mort, ou de qui rêve d’une vie nouvelle.

POLYDOXE. — Tout rêveur n’est-il pas d’abord un grand paresseux ?

EUDOXE. — Oui, quand il se proclame, par avance, impuissant à réaliser son rêve, et qui, par avance, abdique toute volonté, renonce à toute tentative de le réaliser. Mais il s’en faut aussi que nos rêves ne se taillent que dans l’étoffe de la paresse, que tous les paresseux soient des rêveurs. Ils ont, il est vrai, bénéficié de la confusion, d’où vient la faveur dont ils jouissent, incompréhensible et singulière,