Page:France - Opinions sociales, vol 1, 1902.djvu/11

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» — Mon cher Marteau, ce n’est pas drôle.

» — Prenez garde, mon cher Horteur. Ce que je viens de vous conter, c’est, au fond, la Chute d’un ange, de Lamartine, et l’Eloa, d’Alfred de Vigny. Et, à tout prendre, cela vaut mieux que vos petites histoires larmoyantes, qui font croire aux gens qu’ils sont très bons alors qu’ils ne sont pas bons du tout, qu’ils font du bien alors qu’ils ne font pas de bien, qu’il leur est facile d’être bienfaisants, alors que c’est la chose la plus difficile du monde. Mon conte est moral. De plus il est optimiste et finit bien. Car Edmée trouva dans la boutique de la rue de la Gaîté le bonheur qu’elle aurait cherché en vain dans les divertissements et les fêtes, si elle avait épousé un diplomate ou un officier… Mon cher directeur, répondez-moi : prenez-vous Edmée ou la Charité bien placée pour le Nouveau Siècle illustré ?

» — C’est que vous avez l’air de me le demander sérieusement ?…

» — Je vous le demande sérieusement. Si vous ne voulez pas de mon conte, je le publierai ailleurs.

» — Où ?

» — Dans une feuille bourgeoise.

» — Je vous en défie bien.

» — Vous verrez. »