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SOUVENIRS D’UN PAGE.

sur le sort de son épouse, arrivait chez la reine, par une communication secrète des deux appartements.

On a dit, dans le temps, que ces monstres, ayant pénétré jusqu’au lit de la reine, furieux de ne l’y plus trouver, avaient percé les matelas à coups de baïonnettes. Le fait est faux ; il n’allèrent pas plus loin que la salle des gardes. La lutte qui s’y engagea donna le temps d’assurer la porte. J’ai examiné moi-même le lit de la reine, deux jours après, sans y trouver aucune trace de violence.

Il est à remarquer que les gardes du corps, dans l’intérieur du château, n’avaient point leurs armes chargées, et ne purent, par conséquent, se défendre contre les brigands qu’avec leurs épées ; et que bientôt les portes eussent été enfoncées si le général La Fayette, sorti enfin de son sommeil, ne fût arrivé avec la garde soldée de Paris, et n’eût véritablement sauvé la famille royale, en éloignant ces cannibales. M. de La Fayette ne voulait point la mort de Louis XVI, qui eût pu mettre la couronne sur la tête du duc d’Orléans, déjà brouillé avec lui ; mais il voulait entraîner le monarque à Paris, afin d’en être le maître et de diriger les événements. Cet imbécile général, qui se croyait un nouveau Cromwell, ne savait même pas que, dans toutes les révolutions, le peuple n’encense ses idoles que pour les mieux briser ensuite ; et ce héros fameux devait être plongé dans un cachot avant que sa victime n’y fût elle-même.

La Fayette, croyant le roi suffisamment effrayé par