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SOUVENIRS D’UN PAGE.

offrit le roman dépouillé de l’afféterie des Scudery et des La Calprenède, et posa la base et les bornes de ce genre d’écrits. Une alliance aussi illustre que favorable à l’avancement militaire et aux faveurs de la cour vint, par la maison de Noailles, mettre le comble à la fortune de M. de La Fayette, et développer toute son ambition. Peu satisfait de pouvoir, en France, parvenir, encore jeune, aux plus hautes dignités, son esprit inquiet, remuant, ambitieux, voulut les prévenir. Il saisit avec avidité la carrière que la révolution d’Amérique lui présentait, et, instrument des projets nobles mais imprudents de Louis XVI, il alla, près de Washington, cueillir quelques lauriers et puiser quelques idées, pour venir ensuite bouleverser sa patrie.

Telle était la position de M. de La Fayette en 1786. On le voyait rarement à la cour. Silencieux, modeste, il paraissait jouir en lui-même de sa gloire ; mais cette simplicité était plus orgueilleuse que la jactance la plus prononcée. C’était la vanité de Diogène perçant les trous de son manteau. Sa réputation et le zèle qui l’avait fait courir au Nouveau Monde pour témoigner gratuitement son amour de la liberté, le firent nommer successivement à l’assemblée des Notables et aux États généraux, où toujours il se montra factieux, et factieux hypocrite : « Héros de roman, dit M. de Bouille, qui, quoique acteur principal dans la plus criminelle des conspirations, n’en voulait pas moins conserver les apparences de l’honneur, de la probité et du désintéressement, se berçait avec complaisance de