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SOUVENIRS D’UN PAGE.

de sa famille, chérie de tous, et fut admirée de la foule. Son courage, fruit de sa religieuse résignation, en fit, dans les prisons, un modèle de tendresse fraternelle, et on peut dire qu’elle donna aux illustres victimes, dont elle termina la liste, un grand exemple de fermeté dans les épreuves et dans la mort.

Lorsque j’arrivai à Versailles, madame Élisabeth avait vingt-deux ans. La fraîcheur de son teint, sa belle carnation et son embonpoint la faisaient remarquer, moins encore pour sa beauté que pour son air satisfait et la sérénité de son âme qui était imprimée sur sa figure. La force de sa constitution lui rendait l’exercice nécessaire. Elle aimait à jouer au billard, à monter à cheval ; elle se distinguait surtout dans ce dernier exercice par sa grâce, son bon air et sa hardiesse. Mais ces amusements frivoles, nécessaires à sa santé, ne l’empêchaient pas de se livrer aux différents exercices de la religion. Aux devoirs journaliers auxquels la famille royale tout entière se livrait, elle joignait la prière dans la retraite, l’observation de tous les préceptes de l’Église et la fréquente réception des sacrements.

À mon arrivée on ne parlait que du désir de madame Élisabeth d’entrer en religion et de prendre le voile à Saint-Cyr. Le roi, trop attaché à sa sœur pour pouvoir s’en séparer, n’y voulut jamais consentir avant sa majorité. Une voix secrète semblait lui révéler les secours qu’il en tirerait dans ses malheurs et l’engager à la conserver à sa famille comme un ange consolateur