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Page:Francis de Miomandre - Écrit sur de l'eau, 1908.djvu/66

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gagé implicitement à séjourner plutôt dans son salon que dans son cabinet de toilette. Et donc, il descendit.

Ce fut à grand peine d’ailleurs qu’il ne se perdit point au milieu du labyrinthe d’escaliers, de corridors et de chambres qu’il avait d’abord traversé, et ce qui ne contribua pas peu à son embarras, ce fut de retrouver pleines de confuses présences et de très doux murmures, ces pièces qu’il n’avait vues tout à l’heure hantées que de leurs meubles… Des personnes nombreuses (si nombreuses qu’on s’étonnait qu’il pût en rester tant dans la salle du bal), étaient venues chercher là, dans la pénombre propice laissées par de petites lampes sourdes et basses, quelques instants de ce cher répit que la Société refuse si cruellement à ses enfants, lorsqu’en les respectant, elle se respecte. Pour mieux goûter la saveur des minutes trop brèves, elles parlaient peu, et seulement pour s’assurer entre elles que les baisers qu’elles se donnaient ainsi, malgré leur fièvre et leur hâte, étaient la preuve et le gage d’une fidélité durable.

Jamais, dans aucune soirée, Jacques n’avait vu autant de monde s’embrasser. Il comprit, car il n’était point bête, qu’il n’avait fréquenté jusqu’alors que des hôtes dans les salons n’avaient pas d’issue, tandis que, chez madame Morille, deux étages presque entiers étaient abandonnés à l’amour. Il dérangea beaucoup de monde, mais sans le faire exprès, car il était rempli de bienveillance, et il aurait voulu que tout un chacun, malgré son évidente indignité et la médiocrité de son choix, goûtât autant de bonheur avec sa compagne qu’il en avait pris, lui, à retenir entre ses lèvres, la bouche exquise de son amie.

Au fait, où était-elle ? Il espérait la retrouver au grand salon et… Elle lui avait défendu de la reconnaître, mais ne pouvait-il pas demander à lui être présenté ? Ne serait-ce