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Page:Francisque-Michel - Histoire des races maudites, tome I.djvu/13

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Cette vertu jointe à l’amour du travail rendit leur condition plus tolérable ; ils entreprirent de remonter au rang dont ils n’auraient jamais dû descendre, et pendant quatre siècles, du XVIe au XIXe ils ne cessèrent de réclamer contre les mauvais traitements dont ils étaient l’objet. Au XVIIe siècle le pouvoir judiciaire passa de leur côté ; mais ils ne gagnèrent pas beaucoup à ce changement, dû aux lumières de l’époque : les parlements, qui avaient été peu obéis des Cagots lorsqu’ils s’étaient montrés hostiles à cette race vouée au malheur, le furent encore moins de ses adversaires quand ils lui devinrent favorables, et les lois ne purent prévaloir contre l’habitude. Enfin 1789 vint, et les Cagots français, déjà en possession d’une condition meilleure, durent croire qu’ils touchaient au terme de leur longue misère ; ils profitèrent des troubles de la révolution pour détruire les monuments qui les signalaient comme Cagots ; mais leur but n’a pas été complètement atteint, et où les écrits ont disparu, la tradition reste et désigne telle ou telle famille comme cagote. La civilisation dont notre époque se glorifie n’a pas lui également sur toutes les localités encore habitées par les descendants des Races maudites ; si dans les unes elle a entièrement dissipé le préjugé qui les frappait, dans d’autres elle n’a fait qu’en diminuer l’intensité. Il n’y a plus ni Oiseliers ni Marrons, races pareilles à celles des Cagots pour l’aversion dont elles étaient l’objet, mais infiniment moins considérables et dont les annales sont bien plus pauvres ; c’est à peine si l’on compte encore quelques Chuetas à Palma, et quelques Vaquéros dans les Asturies. Quant aux Agots ou Cagots du versant méridional des Pyrénées, ils ne sont complètement émancipés que d’hier, et il faudra beaucoup de temps encore pour qu’ils rentrent en grâce dans l’opinion du vulgaire.

C’est donc aujourd’hui ou jamais qu’il faut écrire les an-