Page:Franck - Le communisme jugé par l'histoire, 1871.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de famille, ils atteignent à un degré surprenant de richesse, de culture et d’abondance. Leur île est parsemée de villes superbes, séparées les unes des autres par des campagnes florissantes. Ils ont des greniers et des marchés publics où chacun, dans tous les temps, va puiser selon ses besoins et sa fantaisie. Ils se réunissent chaque soir autour d’un repas commun où règnent tous les raffinements de la sensualité et du luxe. Sans commerce, sans argent, obligés d’exercer tous l’agriculture avec un métier mécanique, ils jouissent de tous les arts de la civilisation. La difficulté a été prévue par l’esprit pénétrant de Morus, et il y remédie à la manière de Platon, en admettant l’esclavage. Il est vrai que les esclaves utopiens ne ressemblent pas à ceux de la Crète et de Lacédémone ; ce sont les criminels qu’on réduit à cet état, et quand le pays n’en produit pas en assez grand nombre, on va en chercher, on va même en acheter au dehors. Mais qu’importe ? n’est-ce point spéculer sur le mal, et, comme dit Rousseau, maintenir la liberté à l’aide de la servitude ? — L’auteur de la Cité du Soleil Campanella, n’est pas tombé dans cette faute ; aussi a-t-il supprimé la liberté ! Toutes les actions, et jusqu'aux sentiments et aux pensées de ses sujets imaginaires sont soumis à une autorité absolue. Le chef du peuple solarien est quelque chose comme le Père-Suprême dans le système saint-simonien, c’est-à-dire tout à la